ÇA DÉBORDE !

Le centre de tri de Récupération Mauricie débordait, hier.

Le contenu de trois camions chargés de matières récupérées, soit 15 tonnes de papier, carton, plastique et verre, a été jeté dans une cellule d'enfouissement sanitaire, à Saint-Étienne-des-Grès, hier après-midi.


Les trois camions, chargés chacun de cinq tonnes de matières récupérées, arrivaient tout juste au centre de tri de Récupération Mauricie, à Saint-Étienne-des-Grès, lorsque le contremaître a décidé de les détourner vers une cellule d'enfouissement de la Régie des gestion des matières résiduelles de la Mauricie située à courte distance du bâtiment.

 



Le directeur général de la Régie, Robert Comeau, était visiblement dans tous ses états en apprenant l'affaire, hier, puisque le contremaître n'avait aucune directive pour procéder de la sorte. «Il a décidé de faire ça de son propre chef sans nous aviser», dit-il, c'est-à-dire sans aviser le Groupe RCM ou la RGMRM qui sont partenaires à 50 % dans Récupération Mauricie. «C'est un incident. Ce n'est rien de systématique», a assuré M. Comeau lorsque joint à son bureau, hier après-midi.

C'est Le Nouvelliste qui lui a d'ailleurs appris l'information. Il est immédiatement allé s'informer auprès du directeur général de Récupération Mauricie, Michel Camirand, pour se rendre compte que le geste avait bel et bien été posé par un employé en après-midi. «Ça n'entre pas du tout dans les façons de procéder. Notre président (Pierre Bouchard) avait dit qu'on n'enfouirait pas (les matières récupérées)», rappelle-t-il.

Dans une entrevue accordée au Nouvelliste quelques heures avant l'incident, Michel Camirand a expliqué qu'à cause de la période des Fêtes, des quantités de papier et de carton supérieures à la normale s'empilaient dans les hangars de l'entreprise. «À chaque année, c'est comme ça», raconte-t-il. C'est que non seulement il arrive plus de matières au centre de tri, mais les congés d'avant, pendant et après les fêtes de Noël et du jour de l'An ralentissent beaucoup le triage.

Hier après-midi, le centre de tri débordait. Selon Robert Comeau, Récupération Mauricie analysait la possibilité de mettre plus de monde au travail, quitte à ouvrir un autre quart de travail, pour être capable de venir à bout des surplus. Déjà, en fin d'après-midi, on commençait malgré tout à voir la lumière au bout du tunnel.



Il avait été était question, avant les Fêtes, d'entreposer les matières à l'extérieur du bâtiment. Bien qu'il soit conscient qu'il faudra tôt ou tard le faire quand même, Michel Camirand explique que Récupération Mauricie a vendu des matières à perte, en décembre, pour pouvoir vider l'entrepôt.

C'est que l'accumulation des matières, en particulier le papier et le carton, risque de causer des problèmes lors d'une éventuelle reprise de l'économie. Si tous les centres de tri en accumulent, le marché serait en effet inondé de surplus, ce qui empêcherait une hausse de la valeur des matières.

M. Camirand a soulevé cette question lors de la dernière rencontre de la Table provinciale des opérateurs de centres de tri. «Si on arrive tous ensemble avec notre carton en surplus de celui qui entre à toutes les semaines, les prix vont continuer à être faibles. C'est la loi de l'offre et de la demande», fait-il valoir.

Au risque de se retrouver avec pire dans quelques mois, Récupération Mauricie a donc vendu à perte son carton 15$ la tonne, en décembre, une matière qui valait 120$ en octobre.

L'aide ministérielle attendue avec impatience

Les centres de tri du Québec attendent toujours avec impatience des nouvelles de la ministre du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs à qui ils demandent une aide d'urgence de 35 $ la tonne de matières récupérées afin de survivre à la crise économique.



Quelques centres de tri ont dû se résigner à fermer leurs portes au cours des dernières semaines.

Chez Récupération Mauricie, la conseil d'administration a fixé au 28 février la date à laquelle des décisions devront être prises sur l'avenir de l'organisme, raconte le directeur général, Michel Camirand. Ni lui, ni son président, Jean-Guy Doucet, n'ont encore agité le spectre de la fermeture, M. Doucet se contentant de parler, il y quelque temps, de «décisions très graves».

Seule lueur à l'horizon, le prix du carton est tout récemment passé à 25 $. «C'est positif, sauf que c'est timide. Si ce raffermissement-là se poursuivait d'un mois à l'autre, il est possible que d'ici cinq ou six mois, on puisse avoir des valeurs un peu plus substantielles qui puissent permettre au centre de tri de respirer un peu plus facilement qu'actuellement», espère M. Camirand.

Le directeur général de RM prévoit qu'il faudra patienter jusqu'à la fin de janvier pour savoir si les commandes de la Chine se feront un peu plus abondantes. C'est que cette année, le Nouvel An chinois arrive dans la semaine du 26 janvier, explique-t-il. Au cours de cette période, raconte-t-il pour y avoir déjà vécu, l'économie du pays tourne au ralentit. «Tout se place en mode ralentit. Seuls les hôtels, les restaurants et les cinémas sont ouverts. Toutes les autres entreprises, les petits commerces, les grandes entreprises et les institutions financières ferment», explique-t-il.

Or, rappelons que les pays asiatiques, principalement la Chine, achetaient entre 35 % et 40 % de la totalité des fibres sur le marché nord-américain avant la crise.

La Table provinciale des opérateurs de centres de tri se réunira à nouveau le 14 janvier pour analyser la situation. De son côté, Recyc-Québec a créé un comité de travail, sur lequel Michel Camirand devrait siéger, afin d'essayer de trouver de nouvelles avenues pour les matières récupérées. Les fibres représentent 70 % du bac bleu. Il est donc clair que si elles sont maintenues dans une situation d'approvisionnement des usines de pâte et papier, l'industrie de la récupération continuera à vivre des soubresauts, analyse M. Camirand.