Hydro-Québec intente des recours contre la Ville

Hydro-Québec, qui fait face, avec Gaz Métro, à des réclamations de plus de 2,7 millions $ de la part de particuliers ou de compagnies d'assurances à la suite du grand incendie de janvier 2005 dans le secteur Pointe-du-Lac, a décidé de se retourner contre la Ville de Trois-Rivières. La société d'État estime que la Ville est aussi responsable, notamment en raison de la négligence et de l'incompétence des policiers et pompiers intervenus sur les lieux.

Les procédures judiciaires découlant de l'incendie qui a dévasté le coeur historique du secteur Pointe-du-Lac, en janvier 2005, sont loin d'être terminées. Hydro-Québec vient d'intenter une série de requêtes en garantie contre la Ville de Trois-Rivières, à la suite de dommages qu'ont subi certains propriétaires d'immeubles.


Une partie du secteur Pointe-du-Lac, après l'incendie de l'hiver 2005.

«Il y a des citoyens et des assureurs qui poursuivent Gaz Métro et Hydro-Québec. Ces deux compagnies-là veulent nous amener en garantie pour nous faire partager les coûts qu'ils pourraient avoir à payer aux assureurs», résume Yvan Toutant, agent d'information à la Ville de Trois-Rivières.

 



Essentiellement, on parle ici de dommages matériels subis par des propriétaires d'immeubles. Le montant total des poursuites contre Hydro-Québec et Gaz Métro, et qui font l'objet des requêtes en garantie, s'élève à plus de 2,7 millions $.

Hydro-Québec, qui a institué ces requêtes en garantie, est poursuivie en dommages par plusieurs compagnies d'assurances, en recouvrement des indemnités versées à leurs assurés, et par plusieurs de ces assurés eux-mêmes, pour dommages excédentaires. Ces dommages réclamés par les demandeurs seraient la conséquence d'incendies et d'explosions qui auraient été causés par une fuite de gaz massive provoquée par la chute d'un conducteur et l'électrisation d'un fil traceur.

La société d'État allègue que la Ville de Trois-Rivières serait, si la responsabilité d'Hydro-Québec et de Gaz Métro était retenue, également «responsable des entiers dommages réclamés par les demandeurs» pour différents motifs. «Avant et pendant les événements, les policiers et les pompiers, préposés de la défenderesse en garantie, ont été insouciants, négligents et incompétents, ne respectant pas les règles de l'art, dans leur devoir de servir et protéger les personnes et les biens», peut-on lire dans les requêtes en garantie dont Le Nouvelliste a obtenu copie.

Pour soutenir cette prétention, Hydro allègue d'abord que les policiers et pompiers de Trois-Rivières ont omis de se présenter aux séances de formation offertes par Gaz Métro et portant sur les particularités et les méthodes d'intervention lors de fuites de gaz ou d'événements similaires. La société d'État prétend aussi que les premiers policiers intervenus sur les lieux, la nuit de l'incendie, ont omis de reconnaître les signes d'une fuite massive de gaz - odeur, bruits, ébullition en divers endroits - et de prendre les dispositions visant à éviter l'ignition et la déflagration. Ces signes étaient, allègue-t-on, «manifestes et évidents».



De façon plus générale, Hydro soutient que les policiers et pompiers ont omis de reconnaître et d'apprécier le danger immédiat de la situation et de procéder, dès les premiers instants, à une évacuation générale du secteur, «laquelle aurait éliminé toute source d'ignition et empêché déflagrations et incendies». Ils auraient aussi «fait défaut d'apprécier l'ampleur et l'étendue des fuites de gaz et omis d'ordonner aux préposés de Gaz Métro de couper l'arrivée de gaz à partir du poste de détente». Les policiers trifluviens auraient plutôt laissé les gens de Gaz Métro tenter de procéder à une interruption ponctuelle, par localisation, excavation et simple pincement des conduites, ce qui finalement s'est avéré inadéquat.

Enfin, Hydro-Québec prétend que lors de leur intervention sur les lieux du sinistre, les policiers et pompiers ont, «par insouciance, négligence, manque de formation ou de compétence, omis de fermer la ou les valves des tuyaux d'alimentation en gaz d'un ou de plusieurs immeubles, notamment celui abritant [le restaurant] Le Grand Constant, causant par là sa perte totale»

Hydro-Québec veut partager le coût de la facture

La Ville de Trois-Rivières a retenu les services du cabinet Bélanger, Sauvé pour assurer sa défense dans ce dossier de requêtes en garantie. La Ville, explique son porte-parole Yvan Toutant, n'a pas l'intention de céder à ses pressions et continue de nier toute responsabilité dans ce dossier.

«On considère qu'on a fait notre travail», soutient Yvan Toutant. «La preuve, c'est qu'au départ, les assureurs et les particuliers ne poursuivaient pas la Ville», ajoute-t-il.

Du côté de la société d'État, on voit les choses tout autrement. «Nous estimons que la Ville de Trois-Rivières a une part de responsabilité dans ce dossier, pour les motifs qui sont expliqués dans nos requêtes», explique Hélène Laurin, porte-parole d'Hydro-Québec.



En fait, dans ses requêtes, Hydro estime que la Ville doit être considérée comme «seule et unique responsable» des dommages allégués par les demandeurs. Mais on ajoute que si la Cour devait conclure, au terme de l'enquête, que la responsabilité devait être partagée entre Hydro-Québec, Gaz Métro et la Ville de Trois-Rivières, il serait approprié de déterminer leur degré respectif de responsabilité afin de répartir les coûts engendrés par les requêtes.

Les requêtes en garantie pour les dommages matériels n'ont rien à voir avec les recours qui concernaient les dommages personnels et corporels pour lesquels la Ville, Gaz Métro et Hydro-Québec avaient versé chacun 500 000 $. On est toujours en attente de la décision concernant le partage de la responsabilité en cette matière.

Pour ce qui est des requêtes en garantie pour les dommages matériels, la date de comparution a été fixée, en principe, au 13 janvier 2009.