L'épouse du maire Larry Bernier n'a jamais été aussi convaincue de son choix de s'installer définitivement à Lac-Édouard, un village gaulois il va s'en dire. Depuis septembre, Mme Lecours enseigne bénévolement, à raison de trois jours par semaine, à Félix et à Camille. Elle entend tenir la barre jusqu'à ce que la Commission scolaire de l'Énergie estime que le nombre d'élèves dans sa classe soit suffisant pour justifier l'embauche d'une enseignante.
Parent impliqué dans la relance de l'école, Nicolas Bernard souligne que la commission scolaire a accepté de revoir ses exigences à la baisse. Selon M. Bernard, le ratio serait passé de une enseignante pour 22 élèves à une éducatrice pour 6 enfants.
Il faut dire qu'à deux reprises depuis un an, Claude Leclerc et Danielle Bolduc, respectivement directeur général et présidente de la Commission scolaire de l'Énergie, se sont rendus à Lac-Édouard pour analyser de plus près la situation.
«On a beaucoup travaillé avec la Commission scolaire de l'Énergie. Au début, elle était réfractaire, mais aujourd'hui, elle nous aide beaucoup», constate M. Bernard. La maternelle n'étant pas à fréquentation obligatoire, la classe qui a été mise sur pied dans la bâtisse municipale est actuellement considérée comme une école à la maison. Elle n'est donc pas subventionnée.
«Au besoin par contre, nous pouvons faire appel aux services de la conseillère pédagogique, à La Tuque. La commission scolaire nous a également fourni de l'équipement tel que des ordinateurs», tient encore à préciser M. Bernard.
Une «vraie» maternelle
En attendant le jour où elle sera remplacée, Mme Lecours s'investit totalement auprès de Félix, Camille et des autres élèves à venir.
«Ce sont les parents qui sont à l'origine de ce projet. C'est le côté magique à Lac-Édouard», insiste-t-elle, persuadée que c'est en s'engageant individuellement et collectivement que la municipalité va assurer son avenir.
N'allez pas croire que la classe de maternelle de Mme Lecours est une garderie déguisée. «J'enseigne! Les enfants arrivent ici à 9h et repartent à 16 h. Je respecte le programme du ministère et j'en donne même un peu plus. J'ai dans ma classe deux enfants très éveillés», décrit l'enseignante qui, à l'époque où elle était à l'emploi de la Commission scolaire du Chemin-du-Roy, était responsable du volet pré- scolaire.
Mme Lecours peut compter sur la collaboration de deux papas et de deux mamans pour compléter son enseignement. L'école, de type alternatif, permet aux parents de Félix et de Camille de s'impliquer au niveau de l'enseignement des arts plastiques, de l'éducation physique, de l'éveil à la nature, aux sciences et à l'anglais.
Ils ont tout prévu, y compris le développement social des enfants. Ainsi, il arrivera qu'à l'occasion, les deux élèves de Mme Lecours soient jumelés aux copains de la maternelle de l'école Jacques-Buteux, à La Tuque.
D'ailleurs, qui sait si pour une activité portant par exemple sur l'environnement, ce ne sont pas les enfants de La Tuque qui pourraient rendre visite à Félix et à Camille?
La route se fait aussi à sens inverse.
Un baby-boom imprévisible
Les dirigeants de la Commission scolaire de l'Énergie n'auraient jamais pu se douter qu'au moment de prendre la décision de fermer l'école Notre-Dame-des-Neiges, en 2003, un petit baby-boom se préparait dans des chaumières de Lac-Édouard.
«C'est une situation qu'on pouvait difficilement prévoir», fait remarquer Claude Leclerc qui n'était pas à la direction de la commission scolaire au moment où la fermeture a été confirmée.
À deux reprises depuis un an, il s'est rendu dans cette municipalité au nord-est de La Tuque pour rencontrer des parents et le maire de la municipalité, Larry Bernier. «Ils souhaitaient savoir comment la commission scolaire pouvait leur offrir des services sans que les enfants ne soient obligés de s'éloigner de Lac-Édouard», raconte M. Leclerc.
Conscient qu'une heure de route sinueuse, aller seulement, c'est beaucoup pour un enfant de 5 ans, le directeur général confirme l'existence d'une classe de maternelle dans les bureaux de la municipalité, anciennement l'école primaire.
Pour la suite des choses, Claude Leclerc se dit à l'écoute avant de mentionner qu'il n'est pas insensible à la volonté du milieu de se prendre en main. Le directeur général estime que la situation à Lac-Édouard mérite d'être analysée. Une enseignante pourrait éventuellement être dépêchée sur place, pour les enfants de niveau préscolaire et du premier cycle du primaire.
Prudent, M. Leclerc n'a pas voulu préciser quel était le nombre d'élèves exigé par la commission scolaire pour justifier l'embauche d'une enseignante à Lac-Édouard.
«Les gens sont prêts à faire des choses. Ils ne sont pas uniquement en demande de services», a-t-il dit avant de répéter que la commission scolaire continue d'observer la façon dont évolue la situation à Lac-Édouard.